devenir invisible
pour se faire remarquer
et ne plus parler
pour qu'on m'entende hurler
peu à peu j'épuise
mes forces, la vie, les gens,
ils s'érodent doucement
le temps avec moi s'écoule comme du miel
il colle à mes doigts et je ne vois pas au travers
il m'étouffe et m'englue comme une toile de sommeil
un grand voile en coton qu'on me plaque sur les lèvres
mes amis sont des fantômes
mes fantômes sont des reflets
à travers ma peau, les autres,
tentent en vain d'exister
je ne sais plus comment raconter,
sans sortir de l'histoire,
parler du ciel et des odeurs
qui impregnent ma mémoire
je ne sais plus comment raconter,
ce que j'ai fait, dit, vécu,
tout se confond dans une seconde
tout se condense puis s'effondre
tout se condense et puis s'effondre
mes regrets classés dans des cahiers
des listes et des listes de regrets
des mots que je n'actualiserai jamais
des personnes dont je n'ai fait que rêver
je reste enthousiaste
je reste insatiable
je reste Nicolas
avec la haine majuscule, comme un mauvais jeu de mot,
et cette lettre, trop grande parmi les autres,
coincé dans ma gorge et au début de mon nom,
elle éclipse mon ombre pour que rien ne s'éclaire,
pour que jamais je ne comprenne en quel corps je demeure
m'émeut, me meurt, me morfond
d'un jour vivre et de l'autre mourir
ça ne veut plus
rien dire.